Ça y est c’est l’ouverture ! Ça faisait déjà un bon moment que la meute piaffait d’impatience. Ils étaient tous là : les chiens courants qui ne pouvaient s’empêcher de donner de la voix, les chiens d’arrêt beaucoup plus discrets mais néanmoins très efficaces et les petits roquets toujours utiles à la meute pour leur côté teigneux et la perfidie de leurs crocs.
Le gibier, cette année encore il y en avait peu et puis… il y avait tellement de chasseurs… Mieux valait sortir de sa propre chasse gardée et aller fréquenter les terres nationales voisines. Cela tombait très bien depuis que les actionnaires de cette chasse voulaient faire croire qu’ils étaient redevenus respectables et honnêtes ayant abandonné leurs pratiques habituelles de braconnage.
Avant le jour de l’ouverture, il était également essentiel d’avoir fait le pied du gros gibier grâce à quelques repérages et sondages discrets. Notez bien qu’un petit entraînement au pigeon d’argile n’était sans doute pas inutile…
Le jour J ça va péter je vous le jure ! Et c’est ainsi que sous les aboiements de la meute en folie les cartouches claquèrent :
La première salve fut pour les écolos, normal pour caresser les chasseurs dans le sens du poil de lapin ; « il faut être arrogant comme l’homme pour penser que c’est nous qui avons changé le climat ». « On a fait une conférence sur le climat. On parle beaucoup de dérèglement climatique, c’est très intéressant, mais ça fait 4,5 milliards d’années que le climat change… » lançait feu le promoteur du Grenelle de l’environnement.
« Je serai le président de l’action, je n’accepte pas les 238 morts », victimes des attentats depuis janvier 2015, et je mènerai « une guerre impitoyable » au terrorisme islamiste, criait en appuyant sur la gâchette le signataire des suppressions de postes dans la police…
« Je n’accepterai pas les comportements moyen-âgeux qui veulent qu’un homme se baigne en maillot de bain, quand les femmes sont enfermées » dans des burkinis. Il vaut bien sûr beaucoup mieux se baigner au Cap Nègre, nu et sans bouée pour apprendre à nager en eaux troubles, dans une piscine privée naturellement, laïcité oblige… au Cap Nègre, c’est parfait pour couper court aux accusations de racisme !
Je serai « le président de la communauté nationale car en France, la seule communauté qui vaille est la communauté française », hurlait en se dressant sur ses talonnettes un ancien président soi disant républicain devenu communautariste… Il devient urgent de le ficher S, je crois fort qu’il s’est radicalisé !
« Si l’on veut devenir français, on parle français, on vit comme un Français. Nous ne nous contenterons plus d’une intégration qui ne marche plus, nous exigeons l’assimilation. Dès que vous devenez français, vos ancêtres sont gaulois… J’aime la France, j’apprends l’histoire de France, je vis comme un Français… », en clair je m’affirme gaulois et charge illico mon flingue pour la chasse aux voix !
Ne peuvent voter que les gaulois qui sont nés dans la plaine, « cheveux blonds et tête de bois », même s’ils ont pris la pile à Alésia…
Mais avant l’isoloir, ils auront pris un engagement suprême, une main sur le cœur et l’autre sur la tête de Vercingétorix :
« Nous respecterons les sangliers gaulois, parce qu’ils appartiennent à notre histoire ! Nous nous engageons aussi à ne pas abattre les sangliers de race blanche, nous tirerons d’abord ceux qui ont délibérément passé la frontière sans papier et notre tableau de chasse se déclinera sur l’air d’une Marseillaise identitaire ! »
A deux euros la cartouche, on peut vraiment faire un carton ! Deux euros, la bagatelle… Alors si vous vous laissiez tenter, versez vos deux euros en pièces jaunes dans le chaudron avant d’entrer dans l’isoloir. ça pourra toujours servir à Bernadette !
Le Quaireux, le 26 septembre 2016
Nota bene : Tous les gaulois portent peut-être les moustaches, mais tous les moustachus ne sont pas nécessairement gaulois !