Lorsque les médias se focalisent sur telle ou telle personnalité politique soupçonnée d’avoir enfreint les règles de la justice, la réponse des intéressés est presque toujours la même : « j’ai confiance dans la justice de mon pays ». Cette déclaration à l’énorme avantage d’afficher l’assurance de son innocence à différents moments du parcours judiciaire. Mise en examen, jugement en première instance, jugement en appel et consécration absolue : jugement en cassation … on peut toujours avoir confiance…
Mais il y a plus fort encore. Il y a ceux qui se réjouissent de l’intervention de la justice dans leurs propres affaires. Jean François Copé par exemple, disait à propos de l’affaire Bygmalion : « je me réjouis que la justice soit intervenue et qu’elle soit intervenue vite», avant d’ajouter quelques semaines plus tard la phrase rituelle : « Je fais confiance à la justice de mon pays »
Jérôme Cahuzac se disait également très pressé que la justice s’empare de son dossier : « Cette démarche permettra de démontrer son innocence » disait un des ses proches.
Nous n’en sommes là qu’aux hors d’œuvres judiciaires, à ce stade de la procédure l’affirmation de la confiance dans la justice de son pays, s’accompagne toujours d’une affirmation d’innocence : « juré, craché, la main sur le cœur ou sur la tête de ceux qui sont le plus cher… L’innocence n’a pas de prix ! « Je vous le dis les yeux dans les yeux… je n’ai rien à me reprocher… je suis innocent. »
Laissons le temps aux juges de faire leur travail d’instruction, vient alors le jour où ils rendent leur copie.
Il n’y a pas matière à poursuites, l’affaire est classée, le justiciable blanchi. Devant la foule des caméras et des micros réunis on entend alors : « j’avais bien raison de faire confiance à la justice de mon pays ! »
Mais les choses peuvent aussi se compliquer. Il convient alors de crier au complot politique. Parlant tout récemment au nom de Nicolas Sarkozy, son avocat déclare: « Il s’interroge sur le fait que cela sorte maintenant, et parle de manœuvre politique grossière ». Suivra toute une série de déclarations attaquant les juges, le pouvoir en place pour permettre à l’accusé de se poser en victime du système politico-judiciaire. La victimisation succède alors à l’affirmation d’innocence, preuve que ça commence à sentir le roussi…
Il s’agit d’une« énième manœuvre politico-judiciaire, qui terminera comme les précédentes, aux oubliettes », disait Laurent Vauquiez président par intérim des Républicains. Il précisait également dans son communiqué, « personne ne peut être dupe du calendrier qui est choisi, à quelques jours du lancement officiel de la primaire de la droite et du centre …cela s’apparente à une volonté de déstabilisation qui nourrit légitimement les soupçons d’instrumentalisation de la justice ».
Mais où donc est passée la confiance dans la justice de son pays ?
Pour le politique, la grosse difficulté est de ne pas maîtriser le temps judiciaire. Il se trouve qu’il y a des primaires à droite… La victimisation suffira-t-elle à faire oublier le tintamarre des casseroles ? Cela devient vital, non pour la France, comme on voudrait le faire croire, mais pour l’ancien président lui-même. Retrouver le havre de l’immunité présidentielle est la seule solution pour faire glisser les affaires dans les oubliettes de la prescription.
Il n’empêche que se présenter juste pour sauver sa peau, fait un peu désordre dans le tableau républicain, mieux vaut comme d’autres s’être refait une vertu en ayant payé sa dette… ou bien alors ne pas avoir de dette du tout !
Le choix est donc clair. Ou bien fêter la victoire au Fouquet’s ou ruminer la défaite à la Santé ! Dans une cellule VIP bien sûr…
Le Quaireux le 11 septembre 2016