49.3, c’est beaucoup de température, n’est-ce pas docteur ?
49.3, est-ce que c’est grave docteur ? Je veux savoir !
Est-ce l’urgence absolue ou l’état d’urgence à perpette?
J’ai évité la déchéance mais là je n’peux plus y couper.
Vais-je avaler mon bulletin de santé et passer l’arme à gauche, docteur ?
L’arme à gauche avez-vous dit ? Rassurez-vous, il y a peu de chance !
49.3, c’est beaucoup de fièvre docteur !
C’est peut-être mon délire ! Mais j’entends la rue qui gronde !
J’entends des cris de colères sourdes, des cris de refus, des cris qui portent notre histoire
et des voix qui prennent le pavé.
Attention docteur ! Ils commencent à parler d’ordre qu’ils baptisent républicain ! Je ne vois pas la République sous les matraques et les gourdins…
J’étouffe docteur et mes yeux commencent à pleurer, ils me piquent, je ne vois plus rien ! Dans lacrymogène il y a grenade ! Ca c’est pas la fièvre docteur…
Rendez-moi mon bulletin de vote ! On me l’a volé docteur ! Non je n’ai pas voté pour ça ! Rendez le moi ! Il est à moi !
On dit que c’est un coup de force.
Dites au petit caporal de service qu’il a définitivement perdu ses galons !
Dites à tous ceux qui l’accompagnent,
par habitude ou par intérêt,
à ceux qui lui ouvrent la route,
à ceux qui suivent son chemin,
qu’ils peuvent continuer leurs dérives
et leurs reniements.
Mais dites leur aussi qu’ils regardent la faim et la précarité dans les yeux
et choisissent alors leur camp.
Les mots d’espoir ne seront archaïques qu’à la récolte des cerises.
D’ici là, ils portent encore la révolte, le refus, le rejet et la volonté toute simple d’un lendemain meilleur.
Mais surtout, dites leur vite il y a urgence, dites leur vite qu’à force de faire son nid dans l’injustice, on sème, sans s’en rendre vraiment compte, les lourds matins de peste brune.
Le Quaireux le 15 mai 2016