Archives de catégorie : L’humeur du lundi

Les trois temps de la Valls à Manuel…

Premier temps

Prendre un sujet symbolique de « réforme », façon « loi sur le travail ». Commander, préalablement un ou plusieurs rapports sur le sujet. Préparer quelques fuites, savamment organisées vers la presse bien avant la mise en discussion officielle. La remise d’un des rapports commandés est un excellent moment pour ce faire…
Accompagner les fuites de quelques coups de menton bien sentis, pour montrer que l’on n’est pas un dégonflé et bien sûr faire des annonces  totalement maximalistes.
Attendre les premières réactions virulentes… elles ne devraient pas tarder et surtout garder un œil sur les sondages…

Deuxième temps

Donner  alors l’apparence de la concertation en ouvrant des rencontres avec l’ensemble de ceux que, dans cette phase, on appelle partenaires .
Laisser un peu de temps au temps, comme disait…  juste histoire de faire croire que l’on souhaite le débat…
A la suite de ces rencontres, lâcher un peu de lest sur un ou deux  sujets mineurs de façon à donner un peu de grain à moudre à certaines organisations syndicales, cela permettra à leurs dirigeants de faire croire qu’ils auront obtenu quelque chose et qu’il vaut mieux s’asseoir à la table du débat.
La presse les qualifiera  alors de réformistes ce qui, par les temps qui courent, peut apparaître positif aux yeux de l’opinion. Cela permettra de les opposer aux autres syndicats, que vous pourrez qualifier de révolutionnaires si la rue cherchait à entrer dans le débat.  En ce cas, n’oubliez  pas d’en appeler à l’unité de la Nation puisque nous sommes en guerre…

Troisième temps

Maintenir l’essentiel des mesures, les faire voter en jouant la carotte et le bâton avec les députés et sénateurs de sa propre majorité, faire donner pour cela les professionnels des arguments de langage…  puis les professionnels de la menace  discrète… gare à ton investiture…  attention à ta vice-présidence…

Trois  risques majeurs sont cependant à relever :

  1. Mécontenter tout le monde…  Il conviendra alors de se draper dans les habits d’un « vrai réformateur » qui vise le bien de la Nation,  au delà des intérêts particuliers !
  2. Diviser ses propres partisans et réduire la base sur laquelle on avait été élu… Qu’à cela ne tienne : si la gauche vient à manquer, appuyez-vous sur la droite ! Vous pourrez toujours chercher à faire porter la responsabilité de la division sur ceux de votre propre camp qui vous contestent. Traitez-les alors de frondeurs avec le plus grand mépris …
  3. Donner l’impression de l’impréparation et d’un amateurisme gouvernemental. En ce cas, faire croire au contraire qu’il s’agit d’une méthode d’écoute et de concertation…

Le danger d’entrer ainsi dans une Valls éperdue, c’est qu’à force de tourner sur soi, on risque soit de se marcher sur les pieds soit de perdre l’équilibre et de voir trente six chandelles… plus dure sera la chute !

Des abeilles au bourdon…

Sans faire trop de bruit voilà le printemps qui s’radine.  Déjà les amandiers ont commencé à prendre l’hiver en grippe, l’aubépine noire et les pêchers ne vont pas tarder à les imiter, le colza va bientôt jaunir les campagnes, puis viendront les fleurs d’acacia et de châtaignier.

Quel carnet de commande pour les abeilles !

Chez moi,  elles commencent à se mettre au travail, besogneuses, ouvrières infatigables, elles n’ont pas attendu le vote de la loi sur le travail, elles sont déjà totalement macronisées. La concurrence entre ruches voilà leur motivation profonde. Elles ne rêvent que de productivité.

Pourtant les statistiques officielles les concernant font état d’un travail au noir important : elles pollinisent les pommiers, les pêchers, les pruniers et de nombreux autres fruitiers sans jamais  déclarer leurs revenus et leurs avantages en nature. Pour l’instant les services fiscaux ferment les yeux, mais si un jour ils découvraient l’importance de la fraude, je ne suis pas certain  qu’il n’y aurait pas quelques rappels douloureux.

 Je me suis aussi laissé dire que le métier d’abeille était fort dangereux, qu’il y avait une mortalité importante provoquée par de très nombreux accidents du travail. Nombreuses sont celles qui ne retrouvent plus le chemin de leur ruche, et qui errent complètement désorientées jusqu’à l’épuisement et la mort. Et je ne vous parle pas des risques d’attentats provoqués régulièrement par  les frelons asiatiques. C’est l’horreur.

En dépit de toutes leurs difficultés, je les entends besogner, besogner et besogner encore, à tel point que je parierai bien qu’elles ont une ruche en Suisse… En tout cas, leur bourdonnement tombe bien, on parle d’elles à l’Assemblée nationale… à l’occasion du projet de loi pour « la reconquête de la biodiversité ». Quel honneur !

Et que dit-on ? On dit qu’elles devraient, comme d’autres, faire du lobbying auprès des « décideurs » pour diminuer la mortalité au travail. Emporter, par exemple, un petit pot de « gelée royale » au ministère de l’environnement… inutile par contre  de faire la même chose au ministère de l’agriculture…  Faire livrer plutôt un petit bidon de néonicotinoïdes, de chez Bayer naturellement,  il paraît qu’ils en sont friands, obliger les seulement à sniffer sans retenue en leur faisant croire qu’il s’agit d’un parfum de chez Dior… Ils ne savent déjà si peu où ils habitent qu’ils ne vont pas tarder à se retrouver dans les bureaux de la FNSEA…

Et à l’Elysée me direz-vous, on ne porte rien ? Non, je ne crois pas que cela soit nécessaire, à l’Elysée on a le bourdon…

Le Quaireux le 20 mars 2016

Épinglons l’épingleur !

Au nom des pouvoirs que nous lui avons conférés, le Président de la République a épinglé le prince héritier de l’Arabie saoudite, par ailleurs Ministre de l’Intérieur, en le décorant le vendredi 4 mars des insignes de la Légion d’Honneur.

Voulait-il reconnaître par là le futur monarque d’un pays porteur des valeurs des droits de l’homme, qui, depuis le premier janvier de cette année, a procédé à 71 exécutions par décapitation au sabre ?
Quand même, vous n’y croyez pas !

Voulait-il mettre en valeur un pays, grand défenseur de la liberté d’expression, qui, entre autres, condamne à 1500 coups de fouets en public et à 3 ans de prison un blogueur qui affiche ses désaccords avec les émirs.
Non, ce n’est pas possible !

Peut-être voulait-il alors, à quelques jours de la journée mondiale du droit des femmes, honorer le rôle de la police religieuse, chapeautée par le « Comité pour le commandement de la vertu et la répression du vice » qui, par exemple,  interdit aux femmes l’accès à un café sous prétexte qu’il n’y a pas de « mur de ségrégation » dans l’établissement…
Non ! Vous n’y êtes pas du tout ! Il n’a jamais vu tout ça, le Président !

L’Arabie saoudite est un pays de mirages…où se pratiquent des drones de commerces et où s’échangent des chars Dassault, contre quelques médailles … c’est tout !

Alors s’interroger pour savoir si le prince héritier est un digne porteur de la rosette ou s’il est indigne de  porter le ruban rouge ! Simples futilités ! D’autant que cet héritier là, comme les autres, ne pourra pas l’accrocher au revers de son veston, puisqu’il ne porte pas de veston ! Soyons pragmatiques !

Après tout cela, reste-t-il encore une once d’honneur à la Légion du même nom ? Pas sûr du tout…

 

Le Quaireux le 14 mars 2016

Exonérons ! Exonérons !

Exonérons ! Exonérons ! C’est, la solution commune que les gouvernements successifs ont su mettre en place depuis plus de trente ans.  Et la mythique courbe du chômage n’a toujours pas commencé à s’inverser…

Regardons-y d’un peu plus près.

Exonérer pour favoriser l’emploi à temps partiel, exonérer pour l’embauche de jeunes, exonérer pour l’embauche de seniors, exonérer les contrats aidés, exonérer  des cotisations sur les heures supplémentaires, exonérer pour des catégories professionnelles particulières , exonérer les bas salaires. Autre formule le Crédit Impôt pour la Compétitivité et l’Emploi (CICE)… et les Pactes de toutes sortes…

Déjà le Figaro, que l’on ne peut taxer de journal révolutionnaire, écrivait dans son édition du 9 novembre 2011 parlant des exonérations de l’année 2010 : « Pas un record, mais presque. Le montant des exonérations de charges sociales a atteint, en 2010, la somme rondelette de 30 milliards d’euros. Soit une progression de 55% en neuf ans. »

En  2013 selon le site internet gouvernemental « vie publique.fr » les exonérations atteignent la somme de 33,1 milliards d’euros. Selon le même site, la baisse de cotisation  est de 18% pour les salaires compris entre 1 et 1,6 SMIC, et de 19,5% pour les entreprises de moins de 20 salariés.

Au premier janvier 2015, selon les comptes de la Sécurité Sociale, les allègements de cotisations sociales sont de 23,88% pour les salaires  inférieurs à 1,6 SMIC.

Et la courbe ? Elle ne frémit toujours  pas….  Elle n’a toujours pas commencé son inflexion salutaire.  Il faut donc continuer à exonérer, ça fait au moins plaisir aux employeurs bénéficiaires, clientélisme oblige,  même si l’efficacité n’est absolument pas au rendez-vous.

Exonérer ne suffit donc pas !

Qu’à cela ne tienne sus au droit du travail qui est en fait l’obstacle majeur à l’inversion de la courbe !… Et attention, si vous n’êtes pas d’accord, vous allez être ringardisés  et traités d’archaïques, par les tenants de la pseudo modernité libérale qui veulent que, pour créer de l’emploi, il faut pouvoir licencier et travailler plus longtemps !

Alors, allons-y, détricotons ! Détricotons ! C’est le mot d’ordre gouvernemental ! Un point à l’envers, encore un point à l’envers ! Et toujours un point à l’envers !

Détricotons ! Détricotons ! Au bout du bout, à la prochaine élection, on va se retrouver à poil ! Et seuls de savants calculs ésotériques et abscons tenteront de prouver à l’opinion que la courbe a frémi !

Je ne voudrais cependant pas vous laisser croire que l’humeur du lundi est toujours de celles que l’on dit renfrognées, ronchons, besogneuses, tristes comme une matinée sans soleil ou un jour sans pain, ou bien encore  déprimées …comme  « un ciel si bas qu’un canal s’est noyé »  comme disait Brel… Non, il arrive parfois que l’humeur du lundi soit joyeuse, légère, épanouie, ragaillardie…

Ce lundi par exemple, même si la courbe n’a pas frémi, je goûte comme un immense plaisir le nombre de signataires de la pétition contre le projet de loi sur le travail. Plus d’un million de signataires en 15 jours…  Mon plaisir est d’autant plus grand si je regarde en parallèle les 10 000 signatures recueillies par la pétition de soutien à la loi. Même avec des personnalités  comme Gattaz président du MEDEF et Parisot ancienne présidente ça ne fait pas le poids…

Avouez que par ces temps de disette, il y a de quoi être satisfait  que plus d’un million de personnes se lèvent pour résister à la mise en pièces du droit du travail.

Le Quaireux  le 7 mars 2016

 » Les oublieux « 

Les « oublieux » regardent le monde qui les entoure avec leurs yeux glauques d’amnésiques et l’amnésie leur tient lieu de politique.

 Ils ont d’abord oublié leur propre histoire, oublié la lignée qui les aura fait naître,  oublié les pas qui les ont précédés, oublié les respirations, les souffrances et les espoirs  qui leur ont permis d’ouvrir les yeux, ils sont neufs et sans passé. Vierges de toutes générations qui les auraient précédées, ils ne sauraient avoir la moindre conscience de leur propre reniement.

L’oubli n’est que la négation de la pensée.

Manuel Valls déclare à Munich le 13 février 2016 : « Je suis venu faire passer un message d’efficacité et de fermeté… l’Europe ne peut accueillir davantage de réfugiés ». Il a précisé devant la presse allemande : «  la France s’est engagée pour 30 000 réfugiés. Dans le cadre de ces trente mille,  nous sommes toujours prêts à accueillir des réfugiés. Mais pas plus ».

Il a oublié cette période de notre histoire, où chez nous, il fallait fuir ou se cacher pour croire ou pour penser, fuir vers l’Angleterre, la Hollande, l’Allemagne et porter l’habit sombre du réfugié. Normal puisqu’il n’était pas né…

Il a oublié, un peu  plus tard,  la guerre d’Espagne et les 475 000 personnes qui franchirent les frontières de Pyrénées du 28 janvier au 13 février 1939, pour se retrouver dans des camps construits afin d’éviter la contagion des « républicains rouges »… Il est vrai que s’il avait connu ces matins bruns, on l’accuserait aujourd’hui  d’avoir plagié les décrets-lois édités par le gouvernement Daladier.

Normal qu’il n’en ait aucun souvenir puisque, même s’il est né à Barcelone, il n’a pas été concerné par l’exode des Républicains espagnols. Mais quand même 475 000 réfugiés espagnols ça n’a que peu de chose à voir avec les 30 000 qui seront peut-être accueillis sur le sol français…

Que dire alors de  ceux dont les colonnes interminables descendaient le pays  à la recherche d’un abri. Ils étaient français ! Ah ils étaient français ! Et les réfugiés d’aujourd’hui afghans, syriens, libyens ne sont ils pas aussi des hommes, des femmes, des enfants ?…

L’image de cet enfant que la vague a rejeté sur le sable de la plage,  semble déjà jaunie. L’émotion ne parle qu’un tout petit  temps avant l’oubli…

J’entends, avec effroi, la parole officielle, relayée par quelques vieux automates distributeurs d’éléments de langage, déverser leur rancœur sur la gauche morale ! Et j’ai honte, honte  de les voir opposer la morale à l’humanité ! Honte de les entendre  prôner l’efficacité contre la morale, honte de les voir laisser à d’autres la défense  des droits de l’Homme, pour masquer tout simplement  leur propre  reniement.

Honte en fin de compte qu’ils salissent  la France que l’on aime, ouverte, généreuse, fraternelle, pour courir après les politiques pseudo-sécuritaires, et tenter de faire renaître des relents d’unité nationale,  histoire d’occuper, à des fins électorales, les terrains de la droite et de l’extrême droite.

L’histoire de la France mérite largement mieux que cela, surtout de la part de ceux qui ont été portés au pouvoir en tant que socialistes.

 Le Quaireux, le 29 février 2016