Question d’étiquette…

Depuis quelques temps, en consommateur avisé, je me suis évertué à découvrir la poésie des étiquettes. Le repérage des conservateurs, la mise à jour des antioxydants, le nombre important de pincées de chlorure de sodium, la qualité nutritionnelle du pâté d’alouette, la localisation précise des organismes génétiquement modifiés,  le dépistage systématique de l’amidon frelaté, la reconnaissance des émulsifiants, la mise en lumière des exhausteurs, le déchiffrage des acidifiants et enfin  le coloriage des colorants. J’ai travaillé d’arrache-pied pour être performant dans les rayons à  tel point que ma méthode de lecture me semblant tout à fait efficace et efficiente, j’ai décidé de tenter un transfert  pour décrypter les arcanes des étiquettes politiques.

Et là, il faut bien dire que ce n’est pas une petite bière…

Je me suis d’abord mis à chercher un label, me disant qu’un produit labellisé était sans doute un bon produit…  J’ai  rapidement trouvé au beau milieu du magasin les  produits MP – Majorité présidentielle- . J’ai inspecté la marchandise sous toutes les coutures sans jamais en trouver l’étiquette,  impossible de me repérer dans la composition… alors dans le doute, j’ai changé de rayon !

Pour les autres produits, j’ai très rapidement repéré les conservateurs. Il y en avait bien sûr de  plusieurs types sur les rayons : ceux qui en famille  et après le travail,  rendaient grâce à la patrie. Ceux qui cherchaient désespérément un vin de messe sans sulfite pour prouver l’identité chrétienne de  leurs origines. J’ai également rencontré quelques nostalgiques  de la gégène qui refusaient de regarder en face une tête de gondole au prétexte qu’elle proposait un couscous Garbit en promotion.
Il y avait ceux qui avaient pris la mauvaise habitude de changer de nom pour tromper le lecteur d’étiquettes : aujourd’hui LR, il y a peu  Les Républicains, un peu avant RPR, encore avant UMP encore avant UNR, et enfin en remontant à la nuit des temps RPF ! Mais oui mon général !
A ma grande surprise, j’ai retrouvé sur l’étagère quelques produits labellisés MP rangés avec les conservateurs, preuve que dans cette grande surface c’était un peu le foutoir !

Mes recherches m’ont permis de mettre à jour les « émulsifiants qui font mousser »  inscrits sur l’étiquette et je suis d’un coup devenu  un émule des émulsifiants car pour faire carrière il faut absolument faire mousser pour se donner un peu d’épaisseur.
Alors, j’ai décidé d’anticiper la prochaine loi sur la morale en politique et la limitation des mandats. J’apprends déjà à faire mousser, parce qu’à 18 ans je ferai maire, pour trois mandats pour trois mandats comme la loi m’y autorise, à 36 ans, 18 ans plus tard je ferai conseiller départemental, à 54 ans, 18 ans plus tard, je ferai conseiller régional et j’irai jusqu’à 72 ans, puis je ferai député pour trois mandats jusqu’à 87 ans, et pour couronner le tout,  je ferai sénateur pendant trois mandats, on n’est pas chien ! Jusqu’à 102 ans. Là je retrouverai les Dassault et Dassault, père et fils, que j’avais, du reste,  déjà rencontré au rayon des conservateurs… Je commencerai à penser à la  Présidence de la République, qui n’est certainement pas un mandat pour les jeunots !
Pour en arriver là, il faut bien sûr une grande quantité d’émulsifiants pour faire mousser ! Je crains fort qu’il faille aussi quelques résidus  de conservateurs et quelques antioxydants pour être certain d’être bien conservé !

Je me suis enfin penché sur les colorants. J’ai écrasé quelques cochenilles pour faire du rouge encore plus rouge, bien « melenchonné »  il garde sa couleur. Je me suis procuré quelques «graines d’Avignon » bien mûres, mais le vert qu’elles ont donné n’était pas du tout stabilisé, trop attiré par les couleurs voisines pour s’inscrire sur une étiquette…

 J’ai repéré des produits mutants qui changeaient de couleur en fonction  du temps… rose très très pâle dont il aurait fallu  dare-dare regonfler  le chromatisme sous peine de les voir  finir dans l’anémie absolue… Depuis longtemps il y avait de simples nuances de couleur… un petit peu plus foncé par ci  ou un petit peu moins par là, les produits présentés sur le nuancier restaient chromatiquement compatibles.  Mais depuis que les couleurs primaires ont refait surface, la peinture se fait au couteau et la rose prend son  poing dans la gueule…
PS : autrement dit post scriptum,  c’est ce que l’on écrit à la fin… de toute façon la marque est épuisée, elle va changer de nom… Et c’est pourquoi aujourd’hui, elle n’a plus d’étiquette !

Et là, j’avoue que même si je n’ai pas le goût de la délation, je crois bien que je vais faire des signalements à la répression des fraudes. Car comme s’y reconnaître s’il n’y a pas d’étiquette ! On peut passer d’une crèmerie à une autre sans même que le crémier s’en aperçoive…  comment affirmer alors la traçabilité ?

Méfiez-vous des produits sans étiquette, vous n’allez pas vraiment savoir ce que vous achetez… Méfiez vous aussi des étiquettes vides, celles qui ne disent rien de la composition des  produits que vous mettez dans l’urne…, du vin de Touraine ou du Jésus de Lyon…  Il y a là de fortes chances qu’en fin de compte il y ait tromperie sur l’étiquette !

Le Quaireux le 28 mai 2017

Une réflexion sur « Question d’étiquette… »

  1. méfions nous des produits sans étiquette. …mais qui certifie l’étiquette ?
    en ce qui le vin de loire ou le saucisson de lyon on peut faire travailler ses papilles et dans 5 ans ils auront peu ou prou le meme goût
    mais qui nous aurait dit que l’ennemi de la finance essaierait de nous refiler la déchéance de nationalité ? et pourtant il etait étiqueté

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